EMBRACE. L’incubateur « Jugaad »

Né d’un projet académique à l’université de Stanford, l’incubateur « Embrace », qui coûte 1% du prix d’une couveuse traditionnelle, est une innovation frugale adaptée aux régions les plus pauvres et les plus reculées.

L’intitulé du cours est éloquent : « design for extreme affordability ». A l’université de Stanford, les étudiants de Jim Patell, issus de toutes les spécialités, ont pour mission de résoudre, pour le coût minimum, les problèmes de notre monde. Il y a cinq ans de cela, un petit groupe de quatre copains – Rahul Panicker, Jane Chen, Linus Liang et Naganand Mundy, se lancent dans la conception (théorique en premier lieu) d’un incubateur pour bébés prématurés, destiné aux régions les moins développées. Le résultat de cette séance de travaux pratiques vaut tous les 20/20 : aujourd’hui, leur innovation, baptisée Embrace, sauve des vies chaque jour qui passe. Et 90 personnes travaillent pour diffuser leur invention qui a donc, et de loin, dépasser les limites du célèbre campus californien.

L’histoire d’Embrace est un condensé de la philosophie « Jugaad ». Un exemple éclatant de la débrouille et de l’innovation adaptée à des moyens limités. « Faire plus avec moins », en quelque sorte. Si aucun des étudiants de Stanford n’était un spécialiste de la médecine néo-natale, les séances de brainstorming sur les branches d’un arbre du campus ont vite porté leurs fruits.

Simplification maximale

L’enjeu n’est pas pris à la légère. En effet, chaque année, un million de nouveaux nés prématurés décèdent, principalement dans les 24 heures suivant l’accouchement – dont la moitié en Inde. La principale cause est l’hypothermie. A 20 000 euros l’incubateur (nécessitant une alimentation électrique fiable…), la réponse se doit d’être radicale. A l’issue d’un voyage au Népal, Linus Liang rapporte ainsi une étonnante découverte, inimaginable depuis les salles de cours de Californie : l’hôpital qu’il a visité possède bien quelques couveuses… mais elles sont vides. Les naissances se font à domicile, dans les villages. Il faut donc repenser leur produit pour un usage domestique.

Plutôt que d’imaginer un incubateur low-cost, ils imaginent une solution différente, destinée aux parents et non aux médecins. Peu à peu, les prototypes se rapprochent d’un couffin traditionnel, garni de couches gardant la chaleur, rechargeables. Le prototype final est simplifié au possible : il maintient la température avec plus de quatre heures d’autonomie, et seul un voyant indiquant « OK » prévient qu’il est prêt.

Diffusion et éducation

A la fin de l’année universitaire, les quatre étudiants, pourtant courtisés par de généreux employeurs, chacun dans son domaine de compétence, ne peuvent laisser tomber leur projet. Ils ont rempli les critères de leur cours surnommé « extreme » : leur invention coûte moins de 1% du prix d’une couveuse traditionnelle…

Pour améliorer leur produit, ils parcourent l’Inde pendant deux ans, en répercutant les remarques des utilisateurs, pour améliorer petit à petit leur objet. Un passage dans une émission de grande écoute sur NBC, en décembre 2010, consacre leur aventure. Il s’agit alors de passer au stade de la diffusion massive, en lien avec les services sanitaires, les ONG, l’administration indienne… Mais aussi éduquer les mères quant aux dangers de l’hypothermie.

Avec 90 salariés, ils ont déjà aide plus de 3000 bébés, travaillent dans huit autres pays et sont associés à GE Healthcare pour la distribution. Vainqueurs de nombreux prix de l’innovation et de l’entreprenariat social, l’équipe de Stanford poursuit, plus que jamais, son projet en 2014 : ils prévoient de sauver la vie de plus de 50 000 nouveaux nés dans les trois prochaines années.

Embrace et l’innovation Jugaad nous ont été présentés par Navi Radjou lors de Chaos experience.

 

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