Les modèles économiques de l’open hardware

Benjamin Tincq, co-fondateur de OuiShare et Léo Bénichou du département R&D de GDF Suez nous offrent un tour d’horizon étoffé des modèles économiques de l’open hardware. Un article à retrouver en encre et papier dans Open Models, le livre de référence des modèles économiques ouverts.

Le “pot commun” de l’humanité

Au cours des trois dernières décennies, le logiciel libre et open source s’est imposé comme le modèle industriel dominant du secteur informatique. Il repose sur le partage libre et gratuit du code source, développé par une communauté de contributeurs dont la subsistance est souvent assurée par une structure commerciale créant de la valeur marchande au-dessus du “commun”, notamment par le service (conseil, formation, support, etc.). Le succès incontesté de ce mode de développement interroge l’un des fondements du capitalisme industriel, qui veut que les brevets et la propriété intellectuelle soient les instruments clés de la compétitivité des entreprises.

En parallèle, ces dynamiques contributives se sont peu à peu généralisées à tous types de productions immatérielles : les “biens communs de la connaissance” ou “communs numériques”. L’information numérisée y est produite par les pairs, du logiciel libre à l’encyclopédie contributive Wikipédia, en passant par les données cartographiques OpenStreetMap, ou encore les contenus créatifs et scientifiques publiés sous licences Creative Commons et open access. Mais depuis quelques années, les artefacts de ce mode de production ont largement dépassé le seul champ du numérique et du software pour toucher celui des produits matériels, le hardware.

À l’instar du code source d’un logiciel, un objet physique peut être décrit par un ou plusieurs fichiers numériques : plans, schémas, tutoriels et surtout fichiers 3D prêts à prendre vie sous la tête d’une imprimante 3D, d’une découpe laser ou encore d’une fraiseuse CNC (computer numerical control, ou “machine à commande numérique”). Le partage de ces fichiers sous licence libre, couplé à la démocratisation des outils de fabrication numérique (notamment via des lieux tels que les fab labs et les makerspaces), permet de diffuser, répliquer, améliorer et re-partager les objets physiques représentés. On parle de « matériel libre » (open source hardware), ou encore de “design libre” (open design).

Le modèle semble ne pas avoir de limites et touche tous les secteurs ou presque : les composants électroniques (Arduino, Sparkfun), high-tech (OpenReflex, PhoneBloks), les véhicules (Wikispeed, OSVehicle, XYZ Cargo), les drones (DIY Drones, Protei, OpenROV), les machines-outils (RepRap et ses dérivés, LaserSaur, Open Source Ecology), l’habitat (Wikihouse, OpenDesk…), le textile (OpenWear, OpenKnit) ou encore les ruches connectées (Open Source Beehives) et même l’aérospatial (MakerPlane, Copenhagen Suborbitals) !

Les promesses de l’open hardware et de l’open design sont nombreuses : contribution des projets au “pot commun de l’humanité”, mutualisation de la R&D, rapidité des cycles d’innovations, rapport qualité/coût des produits, réplicabilité et adaptabilité, distribution des moyens de production, durabilité des produits, etc. Un élément crucial reste cependant sous-étudié : les modèles économiques de l’open hardware, qui ne sont pas encore totalement stabilisés.

Bien que les coûts marginaux de fabrication imposent une limite physique à la réplication du modèle économique du logiciel libre, leur réduction imputable au développement des outils et lieux de fabrication numériques a permis à certains des acteurs évoqués plus haut de trouver un modèle économique pérenne, même sur un marché de niche.

Du Logiciel au Matériel

Si open source software et hardware relèvent tous deux d’un mode de développement industriel comparable à bien des égards (intensité de la R&D, complexité technique des objets, caractère stratégique des fonctions de design et d’ingénierie, etc.), le passage à la production de biens matériels ajoute une couche de complexité dans le modèle économique de l’open hardware.

Des coûts marginaux de fabrication et de distribution, encore loin du zero marginal cost prophétisé par le prospectiviste américain Jérémy Rifkin. En effet, même si le coût du travail et des machines (du capital, donc) a structurellement tendance à baisser, les matériaux demeurent un poste de coût incompressible, a fortiori dans un contexte de raréfaction des ressources naturelles. L’équation économique d’un projet open hardware doit donc invariablement tenir compte de cette constante.

Une chaîne de valeur fragmentée et complexe : dans l’industrie, les fonctions de R&D, design, production, distribution et services mobilisent des compétences et des outils hétérogènes, qui peuvent être répartis entre plusieurs entités géographiques et/ou juridiques. Par ailleurs, la gestion d’une chaîne logistique impliquant de multiples fournisseurs est d’un niveau de complexité autrement supérieur à l’intégration de fonctions logicielles développées par un tiers. Enfin, une fois le produit assemblé, celui-ci doit être transporté physiquement sur son lieu de consommation, à moins que le fabricant ait opté pour une production locale. Un projet open hardware devra donc se poser la question du rôle qu’il souhaite assumer dans la chaîne de valeur et du niveau de distribution des moyens de production qu’il souhaite embrasser.

Des processus qualité et des normes plus contraignantes : s’il semble difficile de se blesser avec une application web, le risque est en revanche bien réel avec un produit physique tel qu’un véhicule. C’est pour cette raison que la responsabilité des fabricants de produits physiques est nettement supérieure à celle d’un éditeur de solutions numériques, ce qui se traduit par un ensemble de normes, de certifications, de tests et de processus qualité qui complexifient significativement la distribution d’un produit open hardware par rapport à celle d’un logiciel libre.

Typologie de modèles économiques

Ces trois contraintes étant posées, analysons les modèles économiques actuellement à l’oeuvre dans l’open hardware à travers six “archétypes”.

Le modèle non-profit ou “modèle fondation”

Désormais classique dans le secteur logiciel libre, ce modèle s’appuie sur une fondation assurant la promotion et le développement d’une technologie libre, ainsi que l’animation d’un écosystème d’entreprises autour de celle-ci. Les exemples les plus connus sont les fondations Apache, Linux ou Mozilla, qui tirent leurs revenus de dons, de subventions publiques et de partenaires privés.

Si le modèle est encore jeune dans le hardware, on peut citer la Fondation OpenH2O, qui développe des technologies open hardware pour les océans. Elles sont utilisées notamment par Protei, qui développe des drones marins pour nettoyer les océans (OpenH2O est à l’origine une émanation de Protei) et OpenROV, qui commercialise des kits permettant de construire des petits robots d’exploration sous-marine. D’autres exemples incluent le système de construction open source Wikihouse, qui ambitionne de devenir le “wikipédia des objets”, ou encore Phonebloks, qui développe des standards d’électronique modulaire, notamment pour les smartphones, en collaboration avec des industriels tels que Google, ZTE ou Sennheiser.

Retour en vidéo sur Open Expérience #5 sur l’open manufacturing et l’open hardware à Mutinerie :

Monétiser le hardware open source

Pour la plupart des acteurs de l’open source hardware, le principal flux de revenus demeure la commercialisation des produits, que ceux-ci soient vendus en kits ou pré-assemblés. Les marges sur la vente de matériel permettent de financer la R&D et les frais de distribution (vente en ligne et/ou revendeurs). Ce modèle économique prend son sens dans le fait que, pour de nombreux types de produits, la grande majorité des utilisateurs (particuliers, amateurs, etc.) n’ont ni le temps ni l’envie de “sourcer” eux-mêmes les composants et matériaux pour économiser la marge du fabricant. Le coeur de la proposition de valeur de l’open hardware réside ici dans la garantie et la confiance apportée par la capacité à “ouvrir le capot” pour mieux comprendre le fonctionnement, voire modifier, le produit initial afin de l’adapter à un besoin ou un contexte particulier.

La plupart de ces modèles ont en commun un lien très fort avec leur communauté d’utilisateurs, qui assurent une partie de la R&D des produits : le plus souvent sur des forums publics, les discussions concernent les choix de design, de fonctionnalités ou encore de support et le “débug” qui alimente naturellement l’amélioration continue des produits.

Il est toutefois important d’identifier des sous-modèles, selon trois variables : le rôle assumé par le projet dans la chaîne de valeur, la forme sous laquelle le produit est commercialisé (en kit ou pré-assemblé) et le “degré d’ouverture”, c’est-à-dire la nature  des licences utilisées.

Variable n°1 : concepteur, fabricant ou distributeur ?

Assurer la conception, sous-traiter la fabrication

À l’image des produits Apple “designed in California, assembled in China”, il est fréquent pour un acteur de l’open hardware de se concentrer sur la conception et de sous-traiter la fabrication. C’est le cas des célèbres microcontrôleurs Arduino, développés à Turin, mais produits en série par trois partenaires, dont le principal est l’italien Smart Projects (d’où le label Made In Italy). Certains modèles sont égalementassemblés par les américains Sparkfun et Gravitech. Seules les cartes fabriquées par ces trois acteurs peuvent être vendues sous la marque Arduino, unique élément de propriété intellectuelle à être protégé. À ses clients, Arduino garantit la qualité des produits et le support de sa communauté internationale de makers et d’entrepreneurs – un argument qui lui permet de sécuriser des ventes confortables (300 000 cartes en 2011). Les produits Arduino sont ensuite distribués directement par ses trois fabricants, qui fournissent les revendeurs à travers la planète, ainsi que par l’intermédiaire de l’Arduino Store, sa boutique en ligne.

Fabriquer et distribuer soi-même

D’autres acteurs assurent eux-mêmes l’assemblage et la distribution de leurs produits, mais aussi pour le compte de tiers. Ce modèle , typique de l’électronique amateur, est incarné les américains Sparkfun et Adafruit ou le français Snootlab. Ces acteurs conçoivent, fabriquent et distribuent une large gamme de composants électroniques pour tous types de projets, à destination des amateurs et des entrepreneurs. Par exemple, Sparkfun distribue des produits issus de sa conception et des produits conçus par des tiers, qu’ils soient assemblés par Sparkfun (Arduino Pro/Mini, Makey Makey) ou non (Arduino Uno). Le catalogue de produits est 100% open hardware. Lors des conférences TEDxBoulder, en 2013, son fondateur Nathan Seidle expliquait que les créations de Sparkfun étaient souvent copiées en six semaines, les incitant à focaliser leur énergie sur le produit d’après. Il concluait : “Peut-être pensez-vous que je suis inconscient, et qu’une entreprise open hardware ne sera jamais soutenable. Aucun souci. Mes 135 salariés et moi, nos 75 millions de chiffre d’affaires et nos 431 produits non brevetés vous souhaitons bonne chance.”

L’efficience industrielle comme modèle économique

Pour les acteurs fabriquant et commercialisant des produits open hardware, l’optimisation des processus industriels obtenus par la standardisation des composants peut se révéler un atout en vue de sécuriser leur modèle économique. C’est ainsi qu’Open Source Ecology, formé aux méthodes agiles de l’extreme manufacturing aux côtés de Wikispeed, est passé maître dans la fabrication ultra-rapide de ses machines agricoles. Certaines d’entre elles, à l’instar de la presse à briques, peuvent être assemblées en une journée par une petite équipe, ce qui permet de la vendre à une fraction du prix du marché, avec néanmoins une très forte rentabilité horaire.

Variable n°2 : produits en kits ou vendus pré-assemblés

La majorité des projets open hardware commercialisent leurs produits en kits, c’est-à-dire sous la forme d’un lot de composants nécessaires à leur fabrication, associés à une notice sous licence libre. Beaucoup ne les proposent d’ailleurs que sous cette forme, à l’instar du robot d’exploration sous-marine OpenROV et du compteur intelligent Open Energy Monitor, dans la mesure où le pré-assemblage nécessite des ressources nettement plus importantes. Des acteurs aujourd’hui installés comme 3D Robotics, l’entreprise de Chris Anderson qui commercialise les drones de la communauté DIY Drones, ont démarré par la vente de kits, avant de compléter leur catalogue par des modèles pré-assemblés, la différence de prix allant du simple au double.

Variable n°3 : 100% ouvert ou avec restrictions (NC, closed core, dual licensing)

Certains projets sécurisent leur avantage compétitif en protégeant une partie de la propriété intellectuelle. La première approche est de limiter l’usage commercial, au moyen par exemple d’une licence Creative Commons CC-BY-NC, à l’instar du projet XYZ Cargo (vélo-cargo open source), ou d’un modèle dual licensing. Ce modèle, populaire dans le logiciel libre, permet une utilisation gratuite sous une licence copyleft (obligeant un re-partage à l’identique, y compris sur les produits dérivés), ou bien une utilisation payante sans restrictions. Une dernière variante, encore théorique, est la commons reciprocity license théorisée par Michel Bauwens, qui permet l’usage gratuit par les structures à but non lucratif et les entreprises contribuant aux communs, mais qui impose un retour financier pour les entreprises ne contribuant pas aux communs.

La seconde méthode consiste tout bonnement à verrouiller en partie la propriété intellectuelle. C’est ce que fait 3D Robotics sur les pilotes automatiques qui équipent ses drones, ou Makerbot qui a “fermé” ses derniers modèles d’imprimantes 3D. Il va sans dire que cette approche est conspuée par la communauté open hardware : Makerbot, notamment, avait été initialement bâti sur la base de la RepRap, une imprimante 3D open source développée par une communauté très active, qui s’est sentie profondément trahie suite au retournement de veste du fabricant – lequel fut par ailleurs racheté par Stratasys peu après pour 400 millions de dollars.

Monétiser l’Immatériel (le savoir) autour de l’open hardware

La monétisation des savoirs et des compétences est le modèle économique principal du logiciel libre. Si celui-ci est impossible à transcrire de façon aussi triviale dans le domaine de l’open hardware, il est aujourd’hui expérimenté par plusieurs projets, parfois comme unique source de revenus, parfois comme l’une des composantes d’un modèle économique plus large.

Vendre de l’expertise, du conseil, du support

Monétiser son expertise au travers de prestations d’accompagnement, reste l’un des moyens les plus simples pour un acteur de l’open hardware de générer un revenu. Au début de l’aventure Arduino, Massimo Banzi s’appuyait sur les créations de sa communauté pour répondre aux besoins des clients de son agence de design numérique. La firme italienne a ensuite développé une offre pour les acteurs traditionnels souhaitant développer des produits sur une base Arduino, à l’instar d’Intel, qui a annoncé le lancement de son microcontrôleur Galileo lors de l’évènement “Maker Faire” organisé à Rome en 2013.

Autre exemple : Wikispeed, une voiture open source à faible consommation énergétique, dont la méthode de conception et de fabrication de type extreme manufacturing, adaptée des méthodes agiles de développement informatique, fait fantasmer nombre d’industriels par son ultra-efficience bien supérieure aux standards de l’industrie. Des acteurs tels que Boeing ou John Deere sollicitent ainsi les services des membres clés de l’équipe Wikispeed pour les aider à repenser leurs processus industriels, ce qui permet d’assurer la subsistance d’une partie de l’équipe (le projet étant par ailleurs non-profit à ce jour).

Vendre de l’expérience et de la formation

Un autre type de valeur immatérielle assez facilement monétisable repose dans la formation et, plus généralement, l’expérience de construction aux côtés de l’équipe d’un projet open hardware.

Tripalium, association à but non lucratif, assure la diffusion d’une éolienne open source, tandis que Ti’Eole, une structure commerciale adossée au projet, finance celui-ci par l’organisation de stages d’autoconstruction de l’éolienne Piggott. Les stagiaires paient l’accès au savoir théorique et pratique, ce qui permet, en plus de rémunérer deux formateurs, d’entretenir un atelier mobile. Les coût des matériaux est pris en charge par l’apprenti faisant l’acquisition de l’éolienne, qui bénéficie gracieusement de la main-d’œuvre des autres stagiaires. Ti’Eole complète ses revenus par des prestations d’installation et de maintenance de petites éoliennes.

Wikispeed, évoqué plus haut, fabrique ses voitures seulement sur commande des particuliers, qui participent directement à leur construction : une partie de la proposition de valeur réside ainsi dans l’expérience fournie aux clients, qui contribuent à chaque étape de la conception et la fabrication de leur futur véhicule, aux côtés des experts de Wikispeed.

Monétiser un autre produit autour de l’open hardware

Une façon détournée de générer un revenu autour de l’open hardware consiste à commercialiser des produits périphériques ou complémentaires au projet open source principal, qui n’est quant à lui pas nécessairement “ouvert”. Si l’on peut prendre pour exemple le cas classique des machines à commande numérique, des consommables pour imprimantes 3D, ou encore des composants électroniques pour bricoleurs Arduino, un autre exemple pertinent est celui de Tesla Motors.

Elon Musk, serial entrepreneur et CEO du constructeur de véhicules électriques, a annoncé en juin 2014 que sa société abandonnait l’usage de ses brevets, faisant de ses bolides des véhicules open source. Au-delà des considérations sur la réalité pratique de ces déclarations  -notamment le manque de précision sur les licences employées – les observateurs auront relevé qu’avec cette annonce tonitruante, Tesla Motors est en réalité en passe d’imposer ses standards techniques à l’ensemble du secteur, facilitant par là la commercialisation de ses batteries et stations de recharge. En effet, le constructeur investit actuellement plusieurs milliards dans la construction d’une “giga-usine” à batteries sur le territoire américain.

Animer un écosystème : le modèle de plate-forme

Un modèle singulier, encore émergent dans le domaine du hardware mais appelé à se développer dans les prochaines années, est celui des modèles dits de “plate-formes”. Dans ces modèles, un acteur principal anime un écosystème de designers, de fabricants et de distributeurs autour d’un objet commun ou de spécifications communes. C’est le cas d’OpenDesk, qui permet à des designers de proposer les plans de leurs créations (bureaux, chaises, fauteuils, etc.) sous licence Creative Commons, tout en offrant la possibilité aux particuliers de commander en ligne le mobilier de leur choix, et de le faire “découper” à la CNC dans un makerspace ou un fab lab à proximité de chez eux. Le paiement est alors réparti entre le designer, la plate-forme et le makerspace partenaire, qui y voit une source de revenus et de trafic complémentaire.

Autre exemple, à nouveau sur la voiture : OSVehicle, projet italo-chinois officialisé en 2013 qui, au-delà de la commercialisation de la Tabby en kit, propose une “plate-forme open hardware” pour la création de véhicules open source, sur laquelle viendront se connecter un ensemble d’acteurs formant une “chaîne de valeur participative”. Celle-ci permettra de distribuer la valeur créée entre les acteurs de la R&D, du design, de l’industrie ou encore des services.

Accompagner les makers

Ce dernier modèle émergent consiste, à l’instar des fournisseurs de machines-outils et de composants, à développer une offre à destination des projets open hardware eux-mêmes, mais cette fois dans le registre de l’accompagnement. Ceci peut prendre la forme de makerspaces spécialement orientés “entrepreneurs” : commercialisation temps-machine, formation aux outils, ou encore accompagnement technique sur les projets. C’est le modèle de la chaîne américaine TechShop, qu’on pourrait comparer à un Club Med Gym : les dream coachs vous aident à réaliser votre rêve en vous facilitant l’accès aux machines et à la connaissance nécessaire à la mise en œuvre. Une approche également mise en pratique par  L’Usine, à Paris. De même, les incubateurs et accélérateurs de projets hardware, tels que Lemnos Lab et Highway1 à San Francisco, entrent également dans cette catégorie.

Conclusion : vers un système de production post-industriel

Si l’open source hardware reste encore à ce jour un marché de niche au regard des pratiques industrielles classiques, le développement du logiciel libre permet d’imaginer une trajectoire similaire. Les modèles économiques et les stratégies de développement mis en place par les communautés et les entrepreneurs de “matériel libre” sont prometteurs.

Le secteur dans son ensemble devra toutefois relever de nombreux défis : permettre aux projets d’identifier son positionnement adéquat dans la chaîne de valeur, alléger le poids des certifications et des processus qualité des produits en vue de leur commercialisation, mettre en place un nouveau système de licences permettant de “protéger l’ouverture” de produits physiques (à l’image des brevets), développer des outils de financement et d’accompagnement spécifiques à l’open hardware… et, plus généralement, contribuer à la démocratisation de la culture DIY et de la fabrication numérique, nécessaires à l’épanouissement du secteur.

L’open hardware et la fabrication distribuée portent les germes d’un système de production post-industriel, dans lequel les biens seraient produits en majorité localement, tandis que les savoirs s’échangeraient librement à l’échelle du globe. En relocalisant la production, en facilitant la réparation et l’évolution de produits modulaires, et en distribuant les capacités de manière à effacer la frontière entre producteur et consommateur, ce système porte la promesse d’une meilleure distribution des richesses et de la préservation de nos ressources naturelles.

La présentation de Benjamin Tincq à l’Open Hardware Summit :

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Benjamin Tincq

À propos de Benjamin Tincq

Hi! I'm Ben. I'm a writer, peer-to-peer strategist and social hacker.

Léo Bénichou

À propos de Léo Bénichou

Après avoir enseigné les sciences à l’école primaire, il se spécialise en énergie et environnement à l’Ecole Polytechnique puis part étudier à KTH en Suède. Il s’est impliqué dans The Shift Project, lobby d’intérêt général qui s’est donné pour mission de catalyser la transition vers une économie décarbonée. Il a récemment rejoint les équipes de R&D de GDF Suez pour travailler sur les réseaux d’énergie intelligents (Smart Grid). Léo est aussi un électron libre du noyau OuiShare.

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